Ça fait partie de ces moments, dans les métiers du dessin et de l’illustration, dans lesquels il faut savoir répondre aux souhaits du client. Ces moments là sont beaucoup plus nombreux qu’ils en ont l’air, et au final, on s’aperçoit que les moments dans lesquels l’auteur, moi en l’occurrence, est libre de pratiquer le « style graphique » qu’il désire explorer, sont plutôt rares.
Ainsi, pour un recueil périodique de nouvelles de science-fiction, on m’a demandé de dessiner « Astroboy qui fonce dans la vague d’Hokusaï ». La proposition graphique tient donc plus du copiage que de la recherche d’un graphisme original, parce qu'il était nécessaire que le lecteur ne se pose pas de question en regardant l'image. Travailler ces deux références dans un style graphique à part aurait brouillé le message. il fallait faire simple et efficace, tout en respectant les œuvres originales.
Selon les responsables de ce projet, il faut illustrer la science-fiction japonaise, et quand bien même cette proposition graphique soit tellement « cliché » qu’elle défonce des portes ouvertes, elle a l’avantage de répondre aux fantasmes de nous, européens, face à ce que l’on pense de la science fiction nippone. En d’autres termes, quelles que soient les qualités de nos connaissances à propos de l’imaginaire et de la SF nippone, il faut toujours se rabattre sur les désirs du consommateur occidental pour qu’il soit tenté d’ouvrir l’ouvrage qui lui est proposé, et ainsi espérer qu’il aura une image plus évoluée que le cliché qui lui est proposé en couverture. C’est une manière noble d’être vulgaire, au final, c’est à dire de ne jamais oublier que « vulgaire » vient du latin « Vulgus » : le peuple.
Et on peut dire ce qu’on veut, s’il n’y avait plus de peuple, il n’y aurait plus de lecteur. Il faut rester humble. Même si on pense qu’on est totalement propriétaire du style graphique, ou de l’illustration que l’on créé, si on ne la tourne pas vers le « lecteur », si on la garde pour nous-mêmes, ce n’est rien d’autre qu’une forme d’onanisme. Illustrateur - dessinateur, c’est être altruiste, même si on ne le veut pas. Sans le « peuple », sans le public, nous ne sommes rien.
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